mercredi 23 août 2017

La planète sans artifice


Vous le savez certainement puisque l’information a été largement relayée : nous vivons à crédit depuis le 8 août. Nous, cette belle humanité, avons englouti plus que ce que la planète est capable de régénérer en un an.  Nous avons émis plus de déchets et de gaz à effet de serre que ce que la terre est capable d'absorber. Nous puisons donc allégrement dans des ressources qui s’amenuisent de plus en plus. Quelques alertes sur les réseaux sociaux, un œil un peu humide sur le journal de 20 heures. Et hop nous sommes repartis de plus belle. Après tout…

Et pourtant il y a eu un autre signal négatif : le climatologue Jean Jouzel a profité de l’été pour tirer la sonnette d’alarme « Pas besoin de faire de catastrophisme : la situation est catastrophique…Pour espérer rester en deçà de 2°C de réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle, il faudrait que le pic d'émissions de gaz à effet de serre survienne au plus tard en 2020", souligne le climatologue. Nous n’avons que 3 ans devant nous. Sur la plage cela fait désordre mais allez, continuons de bronzer sous ce soleil bientôt très, très chaud.

Nous avons donc (et je ne suis pas la dernière) profité de cette richesse qui nous est offerte. Et notamment les feux d’artifice au-dessus de la mer. Un spectacle majestueux qui a en particulier fait briller mes yeux le 17 août à Juan les Pins.  Le feu d’artifice, 15 minutes de féérie, pour 50 à 70 bombes.  Le projectile le plus courant est appelé « la bombe » (nous ne parlons pas de moi). 

Placée dans un mortier, elle est propulsée dans l’air grâce à de la poudre noire. Mélange de souffre (10 %), de charbon (15 %) et de salpêtre (75 %), cette poudre permet la propulsion, la couleur, le bruit, l’allumage de la bombe, la propagation et le retardement. Elle permet aussi la combustion, ce qui fait souffrir l’environnement. Elle est originaire de Chine.

En explosant, la bombe libère des millions de particules de poussières très fines et du gaz qui peuvent se rabattre sur les spectateurs en raison du vent. Elles peuvent également se maintenir dans l’atmosphère quelques jours puis se déposer dans l’environnement .

Ces particules issues de l’explosion d’un feu d’artifice, seraient cinq fois plus polluantes que celles du smog.

Heureusement tout n’est pas si sombre. Certains produits utilisés sont pour la plupart biodégradables. Et puis la récupération des déchets engendrés se met en place. Bouts de carton, d'aluminium, de plastique, fils électrique... A Cannes par exemple des plongeurs bénévoles se transforment en éboueurs d’un nouveau genre pour récupérer ces résidus dans leur filet.

Faut-il donc renoncer au plaisir d’un beau feu d’artifice ? La question est posée (même si elle semble bien légère). Plus globalement quand allons-nous comprendre que nous filons un mauvais coton ? Au moment de la COP 21 la neurobiologiste Sylvie Granon livrait une analyse intéressante. La voici en partie:

« De quelle catégorie relève la protection de l’environnement ? Force est de constater qu’elle n'est pas perçue comme un besoin vital. Et pour cause : les effets de la dégradation environnementale semblent, en général – même s’il y a des exceptions notables -, très éloignés dans le temps ou dans l'espace, en tous cas trop lointains pour être vus comme une menace directe. Cela tient au fait qu’en termes de survie à court terme, la préservation de l’intégrité physique de l’individu passe avant l'orientation de ses ressources (mentales, d'action, ou financières) vers la sécurité environnementale.

Les attentats et la crainte qu’ils génèrent fournissent une illustration malheureusement tragique de ce phénomène. Ce qui, bien entendu, est normal : il ne servirait à rien d'avoir une qualité de l'air optimale si nous sommes tombés sous les bombes. Ceci explique également que pour que les nations et les individus prennent en compte la sécurité environnementale, il faut d'abord que leurs besoins matériels vitaux immédiats soient satisfaits. Ainsi, la lutte contre le chômage - qui affecte le bien-être actuel de la population - passe avant la prévention des dégâts environnementaux qui affecteront principalement les générations futures.


Il est également important que l’école transmette aux enfants les bonnes pratiques qui permettront de rendre routiniers les comportements bénéfiques à l’environnement. Ce qui, par ricochet, permettra à ces comportements de se diffuser dans la sphère familiale puis dans la société. Cette approche a déjà fait ses preuves pour les économies d'eau ou le recyclage des emballages, désormais adoptés par la majorité des enfants et des familles.  Enfin, pour « déconstruire » rapidement des comportements automatisés délétères, la "punition" semble la plus efficace. La priorité sera ici de les réprimer par des interdictions et des contraintes couplées, par exemple, à des amendes financières

Toutefois si l'on souhaite infléchir durablement le comportement des individus, il est nécessaire de les impliquer dans l’élaboration des contraintes. Et, parallèlement aux punitions sanctionnant les mauvais comportements, il faut renforcer les « bons choix » pour que les émotions qui en découlent soient immédiates et positives. » Vous savez ce qui vous reste à faire en 3 ans…


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