jeudi 29 novembre 2018

Mea culpa : je travaille mais ce n’est pas bon pour la planète


Je sais que je suis une très mauvaise mère pour ce blog que j’affectionne. Cela fait plus d’un mois et demi que je ne suis pas venue y faire un tour pour mettre en avant une initiative écologique ou pousser un « petit » cri de colère. J’ai une bonne excuse : les colloques et les conférences sur le sujet se multiplient. J’œuvre donc en coulisses à faire connaître ces sujets, de Pollutec au SIMI en passant par Marseille et le Forum des Images à Paris, je n’ai plus une minute à moi. La bonne nouvelle est que je rencontre toujours des personnes formidables et engagées qui ,comme moi se disent qu’il vaudra mieux partir en ayant apporté sa petite pierre que de se croiser les bras.

Pourtant de l’optimisme il en faut à revendre en ce moment. Les émissions de gaz à effet battent un nouveau record, Donald Trump affirme être tellement intelligent qu’il ne croit pas au dérèglement climatique et certains gilets jaunes renvoient les « écolos » dans leur 22. Nous sommes indéniablement dans une phase nouvelle. Nous ne transitons pas, nous mutons assez violemment parce que nous avons atteint des limites.


Je ne me lancerai pas dans un commentaire de la PPE, la fameuse programmation pluriannuelle de l’énergie que François de Rugy présente comme un modèle historique de mutation.  Il reste encore beaucoup à faire. De la même manière, je creuse en ce moment la question du reporting extra-financier réalisé par les investisseurs dans le cadre de la loi et de l’article 173. Là encore ça bouge mais beaucoup ne savent pas encore ce qu’ils doivent mettre derrière une stratégie bas carbone. C'est quoi un investissement à impact? Bref il faudrait changer de braquet, prendre une fusée et on continue gaillardement en charrette. (ça c'est pour le clin d'oeil à la bagnole)

J’avoue que certains jours je préfèrerai rester sous la couette à déguster du caramel beurre salé en attendant la fin du monde. Avec mon chéri évidemment. Alors j’ai décidé d’être bisounours. Nous allons peut-être dans le mur mais avec légèreté. Je chausse mes lunettes roses pour vous inciter à lever le pied car plus on travaille plus on pollue. Ca vous en bouche un coin ?

Depuis plus de dix ans, des chercheurs issus de structures aussi diverses que le CEPR de Washington ou le Boston College l’attestent : il existe une corrélation forte entre le temps de travail et la dégradation de l’environnement.  Plus nous travaillons, moins nous disposons de temps pour « faire » : nous consommons des biens à forte empreinte écologique. Pour gagner du temps, on prend l’avion ou on ingurgite des plats préparés. En 2017 par exemple Lewis King et Jeoren Van de Bergh qui étudient différents scénarios de réduction du temps de travail ont conclu que la semaine de 4 jours constituait l’option la plus bénéfique à l’environnement.

Donc voilà travaillons moins, nous nous porterons mieux et nous irons plus décontractés vers un monde à 4 degrés. Promis, je m’y mets l’an prochain…

vendredi 5 octobre 2018

Futé comme une fourmi…ou un bonobo




Il y a des jours où il faut simplement savoir se poser. Mon métier est un luxe, je ne peux que le reconnaître même si tout n'est pas rose. Entre deux préparations ou animations de conférences, des articles ou du média-training, je prends le temps de lire, de me documenter. De retrouver ce qui fait la « substantifique moelle du journaliste » : apprendre pour mieux donner à comprendre. Malheureusement une denrée rare en ces temps où grands médias riment avec rentabilité. Les journalistes vivent dans l’urgence, au rythme de ce qui arrive sans prendre de recul. Combien de fois me suis-je demandé en préparant mon journal « ce sujet que je montais en flèche il y a quelques jours qu’en est-il désormais ? ».  Je ne vous ferai nullement une petite crise sur le bien-fondé de mon existence et de ma passion. J’ai la chance d’avoir pu prendre me prendre un virage. Grâce à mon blog, je peux partager ce que je vis. Toujours apprendre et vous donner à comprendre. 


En ce moment, je découvre l’intelligence animale. Oui je le dis, sans me cacher. Je pensais parfois que certains étaient limités au QI d’une huître ou aux quelques neurones d’un invertébré. Il doit s’agir en fait de l'esprit étroit de quelques humains. Merci notamment à Yolaine de la Bigne de nous rappeler que les animaux sont brillants. Reprenant les interventions lors de l’Université d’été de l’animal, le livre « l’animal est-il l’avenir de l’homme ? » publié chez Larousse est une vraie pépite. Tous les meilleurs spécialistes de l’intelligence animale se sont réunis pour nous montrer que ces derniers avaient beaucoup à nous apprendre en termes de capacité de survie et d’adaptation.

Je profite de ce vendredi après-midi un peu plus tranquille pour vous donner quelques exemples. Connaissez-vous le pouvoir incroyable du chant des baleines ? Pierre Lavagne de Castellan, bioacousticien marin nous le révèle. « Quand on voit les baleines qui chantent face à une masse de phytoplancton en suspension, en région de reproduction dans des eaux chaudes, on peut se demander pourquoi elles font cela. Elles chantent pour la salade ? Qu’est-ce que cela veut dire ? Peut-être qu’elles sont en train de faire quelque chose avec cette salade ? (sic 😊) Si on étudiait cette salade ? Puis on se rend compte que la valeur protéinique de cette salade a augmenté et que seules les femmes accompagnées de baleineaux, c’est-à-dire celles qui allaitent, ont accès à cette salade une fois qu’elle a été traitée par le chant des grands mâles. C’est un travail sur l’alignement des acides aminés, sur les protéines. » Good job collaboratif ! Je vais tenter de chanter devant mes endives ce soir : je ne vous garantis pas un succès absolu. ..

Savez-vous également que les bonobos rient ? J’en vois certains d’ailleurs qui se marrent sous cape. Non, je ne vous parlerai pas de la puissance sexuelle de ces mammifères mais plutôt de leur humanité. Car ils ont aussi beaucoup à nous donner. Claudine André, fondatrice de Loya ya Bonobo un sanctuaire recueillant des petits bonobos orphelins en République Démocratique du Congo passe beaucoup de temps à leurs côtés et a pu les observer« A contrario des gorilles, qui ne supportent pas que vous les regardiez dans les yeux, ou des chimpanzés qui échappent constamment à votre regard, si vous avez le chance de pouvoir échanger un long moment avec un bonobo, il vous regarde-oserais-je le dire-au fond de l’âme…il vous teste, il regarde intensément pour essayer de savoir qui vous êtes vraiment…les bonobos sont les plus empathiques des primates. Il existe entre eux assez peu de violence, et une grande sensibilité aux émotions des autres, visible en particulier à leur façon d’apaiser des congénères montrant des signes de détresse, souvent à la suite d’un conflit. Ces consolations se traduisent par des accolades, des montes sexuelles et autres contacts physiques tactiles. » Vous ne saviez pas quoi faire ce week-end ? Je crois que vous avez la réponse.


Enfin peut-être avez-vous entendu parler de biomimétisme ? Le terme signifie littéralement « imitation du vivant ». Il s’agit de s’inspirer des solutions de sélection naturelle adoptées par l’évolution, pour en transposer les principes et les processus en matière d’ingénierie humaine. Le terme a été forgé par l’universitaire américain Otto Schmitt. Bon nombre d’innovations s’inspirent désormais du monde animal. Il suffit parfois de se baisser pour trouver la source d’inspiration. Prenez les fourmis. Tarik Chekchak spécialiste de biomimétisme nous en révèle les mystères : « Saviez-vous que les fourmis utilisent l’« algorithme des fourmis » ? On a essayé de comprendre comment les fourmis, grâce à des phéromones qu’elles laissent quand elles trouvent une source de nourriture, préviennent les autres. Il y a un certain temps de latence de la phéromone qui est très particulier et très précis dans l’environnement (sinon il y a saturation de l’odeur, si on peut dire). C’est ainsi qu’elles indiquent aux autres fourmis le trajet le plus rapide vers la source de nourriture pour ne pas perdre de temps. Tout cela sert à résoudre ce que l’on appelle le « problème du voyageur de commerce ». Le GPS bien avant l'heure. On peut difficilement faire plus simple. Et pourtant c’est l’infini plus petit qui là encore nous donne des leçons. 

A l’heure où nous essayons d’être plus intelligents avec des robots, il serait peut-être judicieux de regarder de plus près « nos frères d’évolution » les animaux. Envie de reprendre en guise de conclusion cette phrase du paléoanthropologue Pascal Picq: « Il y a soixante ans, nos collègues japonais observent que quand on leur donne des patates douves, les dominants se saisissent de leur part, tandis que les autres doivent se débrouiller. Les dominants ne paniquent pas ; ils n’innovent pas, puisqu’ils sont au centre du système social, ils ont leurs avantages, et donc n’ont pas d’intérêt à ce que les choses changent. En revanche, il y a une femelle qui ne fait pas partie du clan puissant. Elle prend une patate, et comme celle-ci est couverte de sable, elle a l’idée de la nettoyer dans l’eau douce, puis dans l’eau salée. Soixante ans plus tard, tous les macaques vont nettoyer leurs patates dans l’eau…On touche là des principes universels : l’innovation, c’est toujours à la périphérie et jamais au centre. " Suivez mon regard…


lundi 17 septembre 2018

No stress au travail ou comment se créer des "bulles"


La semaine commence bien car je reviens à mon blog en vous parlant de sujets de société et surtout je sais que je ne suis pas stressée.J’ai bien conscience que je vais faire des envieux.
Je vous rassure : il m’arrive de répéter 3 fois à mes enfants de faire leurs devoirs,j’ai des coups de rush dans la préparation d’un débat et en tant que présidente du conseil syndical, je m’en prends parfois dans les dents.
Mais globalement j’ai de la chance car en journaliste indépendante, je peux structurer ma vie à ma façon et avoir des bulles de respiration. Même en pleine journée. Je suis privilégiée.
Car c'est la clé pour bien vivre son stress. Plutôt « comprendre et mieux gérer son stress »

C était le thème de la conférence d'ouverture de la semaine, «Travaillez heureux » organisée par Multiburo qui depuis plus de 30 ans propose des solutions flexibles en bureaux, coworking et salles de réunion au cœur des principaux quartiers d’affaires de Paris mais aussi Bruxelles, Lille, Lyon, Marseille, Nantes, Toulouse, Anvers et Genève. Toute la semaine sera riche en informations sur le sujet.
Le stress, la thématique peut sembler tarte à la crème, me direz-vous. Certains commencent d'ailleurs à se rebeller, ils estiment qu’on nous bassine avec le bonheur au bureau. Ils ont le droit au malheur après tout 😊
Mais la réalité est bien là. 30 % des salariés français se disent touchés par le stress.
Cela fait autant d’effet sur notre organisme que le tabagisme passif. Quand on vit à Paris, notre état est donc encore plus désespéré avec la pollution. 
Une journée sur 2 de travail est perdue en raison du stress. Sans parler du coût économique : le chiffrage est estimé à 2 à 3 millions d’euros de pertes par an.




Ils étaient donc 3 à venir en parler ce matin autour de Clément Fournier rédacteur en chef de e-RSE.net.

Coline Debayle, cofondatrice d’Artips tout d’abord, une "dose d'art au quotidien". Créée en 2013, Artips démocratise l'histoire de l'art à travers de courtes anecdotes ludiques sur des oeuvres d'art et leurs auteurs. Elles sont envoyées sous forme de newsletters. Pour un salarié c’est la « respiration » de quelques minutes dont je parlais.

Stéphanie Chambon conseil en nutrition, fondatrice de l’agence Recette d’Equilibre qui aide à améliorer la qualité de vie.

Après avoir travaillé dans la recherche médicale, Stéphanie a changé son fusil d’épaule et a décidé d’accompagner les salariés dans leur quotidien. Et surtout bannir le recours au « chimique »
Comme elle dit avec humour, « quand on travaille pour une entreprise pharmaceutique, on souhaite tout sauf donner des médicaments. »
Elle constate également que l’on demande souvent à des salariés de faire ce qu’ils ne savent pas faire. Pas de quoi nous décontracter.




Enfin dernier invité ce matin, Sebastien Bequart cofondateur de Gymlib. J’ai vu qu’il était passé sur BFM Business mais ce n’est pas cela qui le rend intéressant…

Son concept est simple mais très efficace : faciliter l’accès aux salles de sport car 70% des Français se désabonnent au bout d’un an.
Il propose donc un abonnement unique dans 2000 salles de sport qui permet d’aller en illimité où l’on souhaite à proximité de son travail ou de chez soi, le tout co-financé par l’entreprise.





Reprenant leurs échanges, je ne vais pas vous livrer des solutions miracle mais des bons conseils pour être mieux.

Comme le dit Coline Debayle, nous sommes tous envahis par le travail. Impossible parfois de déconnecter du smartphone. Je suis la première donc ne me jetez pas la pierre. « Autant mettre un peu du reste de la vie dans ce même travail. » explique Coline. Sébastien a été lui-même surpris du nombre de personnes qui prennent du temps pour faire du sport. C’est une nécessité

La sédentarité est désormais le quatrième facteur de risques devant le tabagisme.
En 1960, on parcourait à pied 6 kilomètres en moyenne par jour en 1960.
En 2010 seulement 600 mètres.
Les Français ont perdu 1h30 de moyenne de sommeil par nuit.
40% d’entre eux dorment moins de 6 heures.
Pour Stéphanie Chambon, il faut simplement « comprendre que l’on a le choix ». (Enfin pas toujours de changer son réveil) Ne pas subir mais s’organiser pour avoir des temps de pause dans le temps de travail. C’est le cas avec les anecdotes d’Artips que l’on peut raconter au diner du soir. C’est encore mieux d’impliquer l’entreprise. C’est ainsi qu’Artips a travaillé avec St Gobain pour mettre en avant l’histoire et les valeurs du groupe. Les salariés découvrent ou redécouvrent leur entreprise et cela donne du sens.

Sebastien Bequard qui est passé par un cabinet de conseil se souvient de sa formation « comment dire non à son manager ». Je ne pense pas que ce soit la tendance dominante. Et pourtant dire non a du bon.

« Relativiser l’importance de son travail pour l’entreprise » c’est aussi une piste. Mais là encore celui qui est broyé et détruit par un supérieur qui le harcèle ne va sûrement pas approuver.

Pourquoi ne prendre aussi le temps le soir de cuisiner sans regarder Top Chef et de choisir ce que l’on a dans son assiette mais sans se mettre de stress et surtout « garder du plaisir » pour reprendre l’expression de Stéphanie.

Sur le papier c’est idéal et très «tendance » mais Coline rappelle à juste titre qu’il y a 2 mondes : ceux qui peuvent se préoccuper de leur « bonheur au travail » et les autres qui doivent juste travailler. L’hôtellerie c’est sûrement très sympa comme le dit Manu mais c’est loin d’être fun. En même temps si vous traversiez la rue, vous feriez déjà quelques pas pour lutter contre la sédentarité…Je dis cela, je ne dis rien.

Alors que faut-il faire ? Je commence moi-même à me perdre. Le maître-mot serait peut-être : « construire ». En résumé vous avez passé une journée de merde mais vous avez au moins réussi à accompagner votre fils pour qu’il réussisse son exercice de maths. Vous avez fait quelque chose de votre journée…Et donc vous construisez à petits pas.

J’ai aussi envie de retenir 2 idées positives. Le stress d’abord peut être bon. C’est cette adrénaline juste avant de monter sur scène ou d’interviewer quelqu’un. Je parle de mon cas mais en journaliste qui se respecte, je suis égocentrée 😊
 

Et surtout souriez ! Comme l’a rappelé Clément Fournier. Car vous libérez plein d’endorphines et au final vous dégagez des ondes positives pour vous et les autres. Même en vous forçant un peu. Donc je vais continuer à sourire. Même si j’ai l’air niais.

mercredi 18 juillet 2018

Tookki: voyageons responsables!




Je suis incorrigible. Il y a une quinzaine de jours, je vous disais que je quittais ce blog pour l’été mais je reviens beaucoup plus tôt que prévu très enthousiaste. Pas parce que la France est championne du monde de foot (bien que ce soit fort réjouissant)mais parce que j’ai envie de vous parler de tourisme responsable. Cela tombe à pic un 18 juillet. Et pour vous parler tout particulièrement de Tookki que ses fondateurs définissent comme  « le guide du routard 3.0 du tourisme responsable ». 
Est-ce que vous songez à votre empreinte carbone en ce moment sur les plages ou ailleurs? Je sais que la question peut surprendre. 87% des voyageurs internationaux disent en tous cas vouloir limiter leur impact sur l’environnement selon une étude Booking d’avril dernier mais seuls 39% disent arriver à le faire en creusant des pistes. Tookki va leur faciliter la vie. Cette application mobile très simple et intuitive vous guide dans vos choix…en ville. C’est en effet la volonté des 3 fondateurs,Julie, Karim et Fabien de valoriser le tourisme durable urbain. « Ce n’est pas ce qui vient en premier à l’esprit des gens. Difficile d’associer vert et ville mais pourtant il existe des lieux qui répondent à ces attentes » explique Fabien Vermot.

Hôtels, restaurants, activités, shopping et enfin transports : en un clic, vous découvrez les offres éco-responsables. A Paris soyons clairs, il reste encore fort à faire. Tookki a recensé une dizaine d’hôtels éco-responsables mais ce sont déjà pas moins de 300 lieux qui ont attiré son attention. Et les fondateurs ne sont qu’au début de leur recherche. Le site a vu le jour il y a un mois. Il dénombre déjà 3 ou 4 téléchargements par jour et 300 followers sur Facebook. Sa cible : les 25-35 ans, très connectés et avec des valeurs éthiques. 
Tookki n’est pas le seul sur le marché mais Fabien Vermot met en avant son sérieux : « nous validons tous les lieux et nous rédigeons nous-mêmes les commentaires ». Vous pouvez les lire sur le blog. Six critères de sélection ont été retenus : le local, le bio, la démarche éco-responsable, la démarche solidaire, le commerce équitable et enfin la mise en avant de la vie culturelle. Vous découvrez en toute transparence les critères retenus pour chaque lieu.

Les fondateurs se sont lancés avec des convictions sur fonds propre et sont en train d’affiner leur modèle économique. Ils privilégient pour le moment la piste d’une commission de 10% sur les réservations et d’un abonnement très raisonnable pour les professionnels mais tout reste encore à définir. Leur priorité : gagner de nouveaux utilisateurs. Pour envisager un déploiement plus large. Le site est centré sur Paris mais il commence à recevoir des suggestions de followers sur d’autres villes de France. Et pourquoi ne pas envisager Berlin, Londres ou encore Madrid ? Les touristes sont les premières cibles mais les habitants d’une ville souhaitent aussi être éclairés sur des offres responsables. D’ailleurs des Parisiens sont amateurs de Tookki.  
Dans mon euphorie, j’oubliais presque un détail. Je suis certaine que depuis le début de votre lecture, ce nom Tookki vous intrigue. Il signifie « voyage » en wolof. Un écho du Sénégal. Ce qui ne me laisse pas indifférente, je le reconnais. 
Là-bas ou ici, l’essentiel est bien de savoir ce que l’on fait quand on voyage. Bel été à vous toutes et tous 😊

jeudi 5 juillet 2018

La transition écologique, parfois, ça me mine


Mon titre est plus que douteux, vous allez vite comprendre pourquoi mais j’ai des circonstances atténuantes : plus je me plonge dans les sujets liés à la transition écologique, plus je doute.
J’ai bien conscience que ce n’est pas très engageant pour lire mon nouvel article. Qui s’annonce comme le dernier avant la longue pause estivale. Je me sens un peu comme cet ours polaire…en apnée :)

Comme que je n’ai peur de rien, je vais aller jusqu’au bout de ma pensée. Je vais même me glisser dans la peau d’un chercheur en espérant me rendre compréhensible.

Rassurez-vous ! Je reste très saine d’esprit malgré quelques mois de rude labeur. C’est tout simplement une matinée que j’ai passé à Mines ParisTech qui m’inspire cette réflexion digne d’une tragédie de Shakespeare.

J’ai en effet découvert que cette école était très engagée en termes de transition énergétique. Elle développe toute une série de programmes et dans le même temps on sent qu'il reste tellement à faire. Je vous préviens tout de suite, le sujet est un peu pointu mais vous avez plus d’une ressource pour suivre, j’en suis convaincue.





Vincent Laflèche, directeur de Mines ParisTech précise donc que « 50% de la recherche est tournée vers la transition écologique et en particulier l’énergie. » En quelques chiffres cette école, ce sont 180 ingénieurs civils diplômés par an, plus de 30 millions d’euros de contrats de recherche et 18 centres de recherches en pointe dans leur domaine. Et 2 Prix Nobel (il faut tout de même le dire) : George Charpak et Maurice Allais. « Nous formons des chercheurs avec un esprit d’entrepreneurs ». L’école se concentre donc sur les défis de la transition écologique. Il serait bien trop long de passer en revue tout le travail accompli.

Nadia Maizi directrice du CMA, centre de Mathématiques Appliquées a retenu mon attention. Et pourtant je ne suis pas un (une?) cador en maths.
Elle travaille notamment sur la prospective des enjeux climatiques avec le déploiement dans le cadre d’une chaire de modèles d’optimisation dédiés à la planification long terme. Elle est donc en lien avec les experts du GIEC. En clair, il s’agit de voir ce que peuvent donner différents scénariis de mix énergétique. 

Elle mène également des travaux en collaboration avec des industriels, en particulier Schneider Electric sur le scénario 100% renouvelables à l’horizon 2050 ou contribue à la décision publique avec des travaux sur la valeur tutélaire du carbone ou la sortie du nucléaire. Vaste débat alors que l’on attend la Programmation Pluriannuelle de l’énergie, la fameuse PPE. Mais bon je sens que je vais vous perdre alors je repars dans du concret pour vous parler de matériaux. « Ils jouent un rôle très important » nous rappelle Vincent Laflèche.





Là encore, des cerveaux se penchent sur l’optimisation de ces matériaux.
Nathalie Bozzolo professeur au CEMEF, le Centre de mise en forme des matériaux à Sophia Antipolis explique que la métallurgie accompagne toutes les grandes mutations technologiques.

C’est ainsi que la chaire industrielle ANR-Safran Opale vise à l’optimisation des propriétés des matériaux que l’on appelle superalliages. Ils sont employés pour la fabrication de pièces de moteurs d’avion.
Dans les faits, ces moteurs ont de meilleures performances lorsque le générateur de gaz fonctionne à une température très élevée.

Le secteur cherche donc à développer des alliages nouveaux ou des techniques de mise en œuvre qui permettent d’optimiser les performances mécaniques dans ce que l’on appelle les ambiances agressives. L’augmentation de la température de fonctionnement des moteurs permet un meilleur rendement énergétique. Nous sommes dans le cœur de notre sujet.

Tout se joue au niveau de la microstructure des matériaux, à savoir ce qui se passe à l’échelle microscopique. Pouvoir voir au plus près comment tous ces petits cristaux peuvent réagir quand on les transforme. C’est tout le travail des chercheurs.  Ces techniques peuvent servir aussi à la fabrication de caloducs pour les centrales solaires thermiques. Il s’agit des éléments conducteurs de chaleur.
Mines ParisTech entre dans l’ère de la métallurgie numérique et développe des outils de simulation numérique pour aider les entreprises à mieux comprendre comment le matériau réagit aux opérations de mise en forme.

En écoutant Nathalie Bozzolo, je ne peux m’empêcher de penser au livre de Guillaume Pitron « La guerre des métaux rares, la face cachée de la transition énergétique et numérique » aux Editions les Liens qui libèrent.


Et son interview dans Techniques de l’Ingénieur : « Pour la même production d’énergie, les technologies utilisées aujourd’hui consomment davantage de ressources que les technologies précédentes. Plus nous irons vers les technologies vertes, plus nous aurons besoin de ressources. La transition énergétique veut prôner la sobriété, mais nécessite l’inverse pour être rendue possible. En clair :  elle nécessite davantage de ressources et c’est un paradoxe. Aujourd’hui, on ne recycle que 1 % des terres rares mais c’est bien 100 % de tous les métaux rares qu’il faut recycler. Toutefois, même si l’on recyclait l’ensemble des métaux utilisés aujourd’hui, il faudrait toujours aller en chercher plus, c’est inévitable."



Je ne dirai pas que Mines ParisTech n'a pas conscience de l’importance du sujet mais l’école en est au début de la réflexion. Comme beaucoup.
Nathalie Bozzolo parle de travaux sur la durabilité des matériaux. Ludovic Molliex de la direction Matériaux&Procédés chez Safran partenaire de l’école évoque la question dans un dossier fourni sur les innovations. « On fait appel à des matières nobles dans la production des superalliages avec des éléments d’addition qui sont parfois rares ou difficiles à traiter. Un travail de fond a commencé autour de la recyclabilité des matériaux et leur empreinte carbone…Dans le futur ce sera un enjeu fort de modéliser tout ce qui est lié à l’analyse du cycle de vie de nos matériels et le matériau est un contributeur dans le cycle de vie. ».





Nadia Maizi souligne d’ailleurs que les scénarios de prospective s’appuient sur des analyses de cycle de vie. Pour ceux que j’aurai perdu entre temps (et je peux comprendre) «  L'analyse du cycle de vie ou ACV est une méthode d'évaluation normalisée (ISO 14040 et ISO 14044) permettant de réaliser un bilan environnemental multicritère et multi-étape d'un système (produit, service, entreprise ou procédé sur l'ensemble de son cycle de vie." Je viens de vous donner la définition officielle. Je ne sais pas si cela vous aide. En clair, quand vous avez une voiture entre les mains, vous ne regardez pas seulement ce qu'elle va coûter en essence, son taux de pollution et son usure mais vous analysez tout le processus de fabrication et ce qu'elle va devenir une fois que vous ne serez plus au volant. Et ce n'est pas simple. Je vous défie d'ailleurs de comparer électrique et diesel. 


Sur le sujet de la recyclabilité, je ne jetterai donc pas la pierre à Mines ParisTech parce que je n’ai rien d’un chercheur. Je vois simplement que la réflexion progresse et que l’école cherche sa place dans un écosystème. Cette matinée a encore ouvert ma réflexion mais le chemin semble long.




Bref, plus je vous parle de ces sujets et plus je doute. J’y reviens. Je crains que nous ne nous perdions dans des concepts. Je réalise à quel point il est complexe d’expliquer les tenants et les aboutissements d’une stratégie environnementale. Nous agissons tout en vivant cette mutation. 
Rien ne dit que ce que nous faisons aujourd’hui sera totalement bénéfique. Rien n’est blanc ou noir en matière de développement durable. Et pourtant le dérèglement climatique se constate régulièrement. Cet été nous le rappelle. Autant de pluie en un quart d'heure qu'en 3 semaines sur la Dordogne. Certains diront que les catastrophes naturelles se sont toujours produites. C'est indéniable mais ces phénomènes sont de plus en plus fréquents.
Alors je vais faire une pause pour revenir avec des antennes encore plus aiguisées. En espérant vous faire comprendre à quel point s’impliquer est majeur. Même si c’est une goutte d’eau. Bel été à tous. 
Profitez avant qu’il ne fasse trop chaud 😉  


mardi 3 juillet 2018

Danone : mission 100% agriculture régénératrice




Pour vivre heureux, vivons cachés. Quand il s’agit de développement durable, Danone préfère agir plutôt que de s’afficher ostensiblement. 
Mais l’entreprise sait aussi à quel point il est important de montrer la voie. Le groupe n’hésite pas à reconnaître qu’il n’est pas parfait. Il vaut mieux être prudent mais qui est parfait? 
Il s’engage simplement à réfléchir un peu plus chaque jour à ce qu’il fait et surtout comment il doit faire. Work in progress.

Il faut dire qu'il a matière avec 4 domaines d’activités phares : les produits laitiers, un secteur en décroissance sur lequel il faut convaincre et innover en permanence.
Il y a les eaux minérales naturelles, Evian, Volvic, Badoit et La Salvetat qui se portent plutôt bien avec l’arrivée des eaux minérales aromatisées.
Ajoutons-y l’alimentation infantile avec Laboratoires Gallia et Blédina et une cible de jeunes parents de plus en plus tournés vers le bio. Enfin un secteur moins connu, la nutrition médicale qui s’adresse aux personnes âgées et aux enfants malades.





Danone doit donc se réinventer pour séduire les consommateurs mais aussi suivre son ADN et ses engagements environnementaux. Le 25 octobre 1972, Antoine Riboud, PDG de BSN avant sa fusion avec Gervais-Danone, prononçait à Marseille un discours sans précédent. Il proposait de « réduire les inégalités excessives en matière de conditions de vie et de travail » et « de trouver les valeurs qui amélioreront la qualité de la vie en disciplinant la croissance » Emmanuel Faber actuel PDG de Danone reprenait en avril le flambeau. Il présentait son projet « Une personne, une voix, une action » Son ambition : faire participer les 100 000 salariés du groupe agroalimentaire aux choix stratégiques à l’horizon 2030.

« Nous allons plus loin avec une vision de long terme à l’horizon 2030 autour d’objectifs stratégiques reliés à ceux du développement durable de l'Organisation des Nations Unies, auxquels nous voulons associer tous les salariés de Danone dans le monde. » 


En plein projet de loi PACTE « plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises » cet engagement est fort mais ce n’est pas le sujet dont je vais vous parler. 
Il me faudrait d’ailleurs plusieurs articles sur ce blog pour passer en revue tous les engagements de Danone.

En quelques lignes, le groupe mise sur la transparence en expliquant un peu mieux ce qu’il y a dans ses recettes, l’amélioration de l’emballage et notamment le recyclage du plastique. Il souhaite également davantage de bio.
6 marques emblématiques de l’entreprise, Blédina, Danone, Danonino, Evian, Volvic et Alpro lancent cette année des gammes bio. Je peux citer« Les Récoltes Bio de Blédina », une nouvelle gamme bio pour les bébés. Pour 2020, Danone s’engage à proposer du bio sur 100 % de ses produits enfants. Il souhaite prendre la place de leader de l’alimentation infantile bio.




Danone milite par ailleurs pour un nouveau modèle agricole durable : l’agriculture régénératrice. Je voudrais m’y attarder parce que je suis certaine que cet adjectif vous parle mais que vous avez bien du mal à saisir tous les tenants et les aboutissements. Je vous rassure, c’était aussi mon cas avant de creuser le sujet.

Préserver les sols, c’est tout l'enjeu de cette agriculture parce que malheureusement cela ne coule pas de source.
Les pesticides sont l’un des aspects du problème. Il y en a un autre qui peut davantage nous échapper : les agriculteurs labourent régulièrement et ne font pas du bien au sol. Retourner la terre l’appauvrit.
C'est ce qu'affirme Sarah Singla agricultrice en Aveyron et fondatrice de Hum’s. Une jeune femme pétillante qui a pris son bâton de pèlerin pour former ses confrères. Et en vidéo elle est très convaincante. 


Pour elle, les agriculteurs doivent développer le semis direct sous couvert végétal. Il s'agit d'une technique agricole qui consiste à implanter une culture directement dans un couvert végétal sans avoir préalablement travaillé le sol. Sarah Singla m'a d'ailleurs montré une photo de son champ au moment des semis. Un vrai bazar. Des végétaux partout. L'agriculteur doit donc oublier les outils métalliques pour privilégier une autre méthode.
Sarah Singla n’a pas la langue dans sa poche, pour elle, les récentes inondations sont certes liées à l’urbanisation mais le trop grand travail de la terre n’a rien arrangé. A force d’être retourné, le sol n’absorbe plus l’eau.
Dans une interview, Sarah Singla reprenait une phrase de l’américain David Montgomery, « l’érosion des sols c’est l’érosion des civilisations ».
« A chaque fois qu’une civilisation oublie son sol, elle finit par disparaître. Le sol est le fondement de tout – sans sol, il n’y a pas d’agriculture et sans agriculture, il n’y a pas de civilisation. » Quand on sait que cette technique ancestrale remonte aux Egyptiens, on comprend mieux les enjeux.

Cette agriculture de conservation ou régénératrice est donc majeure aux yeux de Danone qui ne doit pas oublier son business. Le groupe s’est fixé une grande ambition: en 2025, 100 % des produits cultivés en France devront être issus d’une agriculture régénératrice. C’est un lourd défi car beaucoup d’agriculteurs restent attachés à un modèle. Comme l’explique Sarah Singla, beaucoup s’accrochent à leur tracteur, quitte à s’endetter pour un nouveau modèle à 400 000 euros.
Danone y croit et rédige son cahier des charges en partenariat avec des ONG et experts référents en la matière. Ce sont 2300 agriculteurs qui travaillent pour la célèbre enseigne.
Pour Emmanuel Faber « la grande limite du système agro-industriel actuel, c’est d’avoir parié entièrement sur la plante en créant des semences de plus plus performantes et en leur ajoutant des intrants de synthèse de façon à booster leur performance. Dans ce système, le sol n’est qu’un support, aujourd’hui épuisé. ». 

Le géant de l’agroalimentaire va s’associer à la plateforme de financement participatif Miimosa pour cofinancer les transitions agro-écologiques des agriculteurs qui les fournissent.  Danone souhaite aussi mobiliser les consommateurs. C’est pourquoi le 21 septembre prochain, 100% des ventes seront totalement dédiées à financer cet accompagnement. Il appellera ce jour le Green Friday. Une journée de chiffre d’affaires, c’est 5 millions d’euros. Une première étape pour changer la donne. N’est-ce pas aussi cela être une entreprise à mission ?

Crédits Photo: Danone et Youtube


mardi 5 juin 2018

Le dérèglement climatique n’est pas un feu de paille



Vous le saviez, vous, que c’était la journée mondiale de l’Environnement ? J’avoue que je n’avais pas tiqué jusqu’à recevoir un mail. Un comble pour une journaliste qui se définit comme spécialiste « transition écologique ». C’est mauvais signe, non ? Cela m'a donné envie de retrouver mon blog.


J’ai la désagréable sensation que, plus la planète se dégrade, moins l’homme agit. Enfin pas l’homme (certains sont très conscients) mais nos politiques. Noyés dans le glyphosate et l’huile de palme, ils ne semblent plus y voir très clair. Même des événements forts me laissent pensives. Des vaches à BiodiversiTerre place de la République à Paris le week-end dernier? Ne dit-on pas que l’élevage bovin accentue l’effet de serre et la déforestation ? 
Pourtant il y a urgence. Des scientifiques tablent sur une hausse de la température moyenne de la surface de la Terre pouvant atteindre les 4,8°C au vu de la quantité possible d’émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2100. La sixième extinction animale de masse aurait débuté. La disparition d'espèces est cent fois plus rapide que par le passé. Je vous éviterai tous les chiffres...vous iriez consommer des anti-dépresseurs qui vont finir dans nos rivières...



Cette année, pour ce 5 juin, journée mondiale de l’environnement, l'ONU met l'accent sur la lutte contre la pollution plastique. Son slogan « Beat Plastic Pollution » (« en finir avec la pollution plastique »). Et un combat : lutter contre l’utilisation de plastique à usage unique .On a beaucoup parlé des sacs. Parlons maintenant des pailles. L’été approche, vous allez encore siroter votre cocktail en vous dorant la pilule. Une habitude sympathique mais nuisible à notre environnement. Les pailles en plastique jetables sont difficilement recyclables en raison de leur petite taille . Résultat : elles sont au mieux incinérées ce qui pollue l’air. Au pire elles finissent dans le caniveau. Et très probablement dans le ventre d’un poisson.
En France, chaque jour ,8,8 millions de pailles sont utilisées et jetées et ce uniquement dans la restauration rapide. Les pailles en plastique font partie des 10 déchets les plus ramassés sur les côtes françaises. 


Rappelons que chaque année ce sont 8 millions de tonnes de plastique qui sont déversées dans les océans . C’est l’équivalent d’une benne à ordures de plastique déchargées chaque minute.  Certains ont commencé à agir. Au Canada, la ville de Tofino a éradiqué les pailles en plastique depuis 2016. Aux Etats-Unis, Seattle est devenue la première ville à interdire les pailles en plastique dès l’été 2018. En Angleterre, McDonald’s va désormais passer aux pailles en papier grâce à une pétition. Les citoyens ont donc un rôle fort à jouer.  


Soyons indulgents :) Tout n’est pas si sombre dans notre beau pays, même si j’ai quelques doutes ces temps derniers. La France a déjà décidé d’interdire les gobelets, verres et assiettes jetables en plastique, ainsi que les cotons tiges en plastique, d’ici 2020. Pourquoi pas les pailles ? Arrêtons de regarder la poutre dans l’œil du voisin et passons à l’action ! La journée de l’environnement, cela devrait être tous les jours !

mercredi 11 avril 2018

Buvons du bon vin car nous allons trinquer !



C’est avec toujours un grand plaisir que je retrouve mon blog. Trop peu souvent mais c’est pour la bonne cause : je jongle entre les débats sur la pollution de l’air, les circuits courts de l’énergie, le numérique et l’humain et un futur colloque sur le climat en 2050. Je ne vais pas me plaindre. Si je reviens, c’est pour vous parler d’une expérience hors du commun que je viens de vivre. Goûter un vin venu directement de 2050 ! Je n’ai pas été propulsé dans une fusée dans l’espace perdant tout repère mais tout a commencé ce mardi soir au musée du vin dans le 16ème arrondissement de Paris. Le service de presse avait bien fait les choses. C’était le lancement de la Cuvée Bordeaux 2050. Une première mondiale. Nul n’avait osé jusqu’à présent. Je vous le répète, je suis une privilégiée. Derrière cet événement, l’association des journalistes de l’environnement, l'AJE. Son président Valéry Laramée de Tannenberg et Yves Leers ,spécialiste de l’environnement ont publié il y a presque 3 ans " Menace sur le vin, les défis du changement climatique " chez Buchet/ Chastel. Jamais personne avant eux n'avait abordé la question, personne ne l'a fait depuis. Et pourtant savoir que le "jaja" est menacé pour reprendre le terme employé par Valéry Laramée de Tannenberg, cela devrait en inquiéter plus d'un. 



Pour aller encore plus loin dans l’aventure, ils ont donc décidé de faire appel à l’œnologue Pascal Chatonnet, fondateur du laboratoire Excell. C’est ce chercheur qui a élaboré le vin du futur.

Plantons le décor d’abord. Nous sommes en 2050. Le dérèglement climatique est plus que jamais une réalité. Les conséquences sont fatales : les vignobles du centre de l’Espagne et de l’Aquitaine sont sur le point de disparaître si ce n’est déjà le cas. La carte présentée par Yves Leers parle d’elle-même : d’ici 70 ans les vignes pourraient se décaler de 1000 kilomètres au nord de leur limite traditionnelle. 1000 kilomètres au nord en diagonale, on se retrouve en Allemagne. En Angleterre, d’ores et déjà les viticulteurs font un très bon champagne.


L’impact du réchauffement sur le vignoble est multiple. Avec une augmentation de 2 à 4 degrés, l’arôme est appauvri et le goût trop mûr. Les périodes de sécheresse modifient le goût qui devient plus sec et amer. Sans oublier la grêle et les inondations qui gâchent le fruit. Ces 5 dernières années, Bordeaux a connu 3 périodes de sécheresse. Déduisez-en ce que vous voulez.

Cela n’augure rien de bon pour notre Bordeaux de 2050. Pour le réaliser, Pascal Chatonnet a assemblé les 2 cépages traditionnels de la région, le merlot et le cabernet sauvignon mais sous des latitudes plus au sud,  anguedoc-Roussillon et même Tunisie. Un climat plus chaud et plus sec. Vous me direz que le terroir n’est pas le même. C’est un fait mais globalement nous avons avec ce vin un avant-goût amer de l’avenir. Il est très différent du profil original. Un Bordeaux méconnaissable.


Je ne serai pas trop technique car je ne suis pas experte. Rien qu’à la couleur, il n’a plus rien d’un Bordeaux. Ce sont presque des couleurs de Gamay. Il faut dire que les pigments sont modifiés par la chaleur. De la même façon, le vin est fruité, des fruits rouges mais plutôt cuits. Rien de très frais. Quand vous le mettez en bouche, vous avez d’abord une sensation onctueuse, presque sucrée mais qui disparaît vite car les tannins prennent le dessus. Une astringence qui vient du merlot…stressé. Le pauvre! En résumé le vin est moins fin et moins élégant. Par ailleurs il ne vieillira pas bien. Pour le moment, certains viticulteurs de la région sont contents. Ils ont élaboré de bons vins après des étés chauds. La cuvée 2016 est remarquable. Mais attention, quand il fait trop chaud cela ne marche plus.


Comment faire alors ? Il est temps de réfléchir à d’autres méthodes. Certains réalisent des tests notamment avec des cépages portugais. Mais les cadres restent très rigides. Comme le rappelle Pascal Chatonnet, les trois maîtres-mots en matière de vinification sont « loyal,local et constant mais ne n’oublions pas, rien n'est constant. » Amateurs de bon vin, est-ce que je vous ai fait peur ? Le vin est notre patrimoine. S’il est atteint, il ne sera pas le seul. Comme le dit Yves Leers : « tant de choses sont à notre portée mais il en est une plus simple que les autres : se convaincre la réalité du changement climatique »

Je n’aurai donc qu’un mot : Santé !